Découvrez l’avis d’expert de Laurent Habib, Président de l’agence Babel, Président de l’AACC, membre du comité exécutif du Medef.
Que se passe-t-il aujourd’hui dans la communication des marques ?
Je suis à la fois critique et inquiet sur ce qui se passe. On constate une domination croissante des plateformes et son corollaire : des contenus plus faibles, moins créatifs, plus fonctionnels et une forme de paupérisation à la fois des marques et des acteurs du métier. Toutes les marques disent, aujourd’hui, plus ou moins, la même chose, de la même manière avec les mêmes solutions inspirées par la data et l’IA.
Bien sûr, dans un premier temps, on obtient plus de performance client.
Cette mesure de court terme est contradictoire avec la mesure de long terme. On peut vendre plus mais c’est au détriment de l’identité de marque et de sa valeur immatérielle au long terme. On se souvient de Cardin ou de Kodak, ou de la Roche aux Fées. Les marques ne sont pas immortelles. Elles sont fragiles. Il est important de préserver son identité de marque, sa valeur, de ne pas perdre sa singularité. Bref les marques sont un atout extraordinaire face à la modernité. À condition de les protéger. Avec le prisme exclusif de la technologie et la logique de l’algorithme, ce sont les Amazon, Google et Facebook (GAFA) qui prennent le pouvoir et… captent la valeur. Nous n’avons donc pas qu’à y gagner.
Et la mesure ?
On est à la préhistoire de ce que peut réussir à faire la mesure. Celle-ci peut être poussée dans des dimensions inconnues et avec une précision toujours plus exceptionnelle. Aujourd’hui avec le digital et les nouvelles technologies, tout, absolument tout, est mesurable. Et cette information est possible sur le commerce, la relation client, comme sur la réputation. De façon totalement claire et limpide. La vraie question est : on mesure quoi, pour aller où, avec quel but ? La somme des bonnes opinions est-elle garante du succès et de la légitimité ? Les comportements d’aujourd’hui prédisent-ils ceux de demain ? Mon pari est de laisser encore une part au génie humain : surprendre pour innover, se différencier pour exister, créer pour émouvoir, se faire détester pour mieux se faire aimer. Voilà de vraies limites pour l’intelligence artificielle.