L’un des défis RH aujourd’hui consiste à garder les talents de l’entreprise. Jean-Noël Chaintreuil, Carole Ballereau, Camille Barbry et Benjamin Fouks nous expliquent l’intérêt de la mobilité interne.
Favoriser la mobilité interne
La mobilité interne a augmenté de 42 % à la suite de la pandémie, car beaucoup d’entreprises ont ralenti ou arrêté leurs efforts de recrutement pour miser sur la montée en compétence des collaborateurs existants. C’est également le résultat d’un effet générationnel : les générations X et Y remettent plus en question leur emploi, c’est ce qu’on appelle « la grande démission » (« The Great Resignation »). Ils attendent aussi plus de flexibilité et ne suivent plus un chemin de carrière linéaire. Alors, comment faire en sorte de ne pas perdre ces talents ?
40 % des employés restent plus longtemps dans l’entreprise lorsque ces dernières ont un recrutement interne important ;
Les avantages à la mobilité interne
« L’herbe semble toujours plus verte ailleurs » : par manque de visibilité ou de projection, de nombreux collaborateurs quittent l’entreprise car ils pensent que cela sera le moyen de progression le plus simple et le plus rapide. C’est même la raison numéro un évoquée lors d’une démission. Ajoutons à cela les chiffres suivants :
- 40 % des employés restent plus longtemps dans l’entreprise lorsque ces dernières ont un recrutement interne important ;
- les personnes recrutées en interne sont 20 % moins susceptibles de quitter leur emploi lors de la première année.
Cela sans compter le coût bien plus élevé pour l’entreprise d’un recrutement externe (+18 %) et le risque d’un non-alignement de la nouvelle recrue avec les valeurs de l’entreprise, cause importante de rupture de contrat au cours de la première année. Un recrutement
interne est aussi bien plus rapide (20 jours en moyenne contre 39 en externe).
Les points bloquants à la mobilité interne
Le premier point bloquant est la crainte des managers d’entrer en concurrence avec d’autres équipes : si je dévoile les qualités de mes collaborateurs, je risque de les perdre. Mais ne vaut-il pas mieux penser « entreprise » au lieu de les perdre face à la concurrence ?
Le deuxième est des job boards peu faciles à consulter, ou des démarches administratives lourdes et opaques démotivantes et frustrantes, qui favorisent en retour une recherche externe. Il est aussi important d’accompagner les collaborateurs lors d’un refus de mobilité pour ne pas générer de frustration supplémentaire.
Enfin on observe, surtout dans les plus grandes entreprises qui ont souvent une inertie plus forte, une obsolescence précipitée du référentiel due à l’évolution très rapide de certaines compétences.
Comment faire concrètement ?
Comment mieux cadrer ce processus de mobilité ? En donnant à vos collaborateurs des perspectives concrètes d’évolution, vous leur donnerez envie de s’impliquer sur le long terme et de contribuer ainsi à la croissance de votre organisation. Voici quelques recommandations.
Recommandation 1
Mettre en place une gestion prévisionnelle des emplois et des compétences (GPEC). Il s’agit de cartographier les compétences des collaborateurs ainsi que de prévoir celles qui seront nécessaires à l’évolution de l’entreprise, afin d’identifier les axes d’évolution des collaborateurs et les accompagner dans leur parcours. Aujourd’hui, très peu d’entreprises sont capables d’en produire une, et la plupart ne savent pas recommander un itinéraire optimal à leurs collaborateurs.
Recommandation 2
Contextualiser des compétences qui peuvent parfois être difficiles à mesurer, en définissant pour chacune d’entre elles le besoin précis et mesurable qui leur est associé. Par exemple : au lieu de demander de « parler anglais », préciser le score TOEIC requis pour le poste ou un nombre d’expériences concrètes dans un pays anglophone.
Recommandation 3
Notifier de façon dynamique aux collaborateurs les postes disponibles en interne en fonction des entretiens qu’ils passent régulièrement et de leurs souhaits d’évolution. Cela passe bien entendu par une mutualisation des différents outils sur une seule et même plateforme.
Recommandation 4
Rendre le collaborateur acteur de son évolution : faire participer les collaborateurs à l’enrichissement des outils de mobilité interne pour qu’ils soient au plus près des véritables besoins des équipes et des collaborateurs. L’avantage : ceci permet de pallier l’obsolescence du référentiel évoqué plus haut.
Recommandation 5
Mettre en place des incitations pour encourager les managers à développer les compétences de leurs collaborateurs et à soutenir leur croissance. Les managers qui sont récompensés uniquement sur les résultats de l’équipe et non sur la promotion de la mobilité interne n’ont aucune raison d’accueillir la perspective de perdre un membre d’équipe performant, ce qui crée un obstacle à la mobilité, quelle que soit l’intensité avec laquelle les RH encouragent les programmes de mobilité.
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